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EPFL

Architect(s:

Zweifel + Strickler + Associés

Le projet conçu pour l’Ecole Polytechnique de Lausanne est réalisé par le bureau d’architectes zurichois Zweifel + Strickler + Associés à la fin des années 1960. Le plan directeur de cette nouvelle université répond notamment à l’augmentation démographique de la population estudiantine de l’époque. L’emplacement choisi se situe à l’extérieur de Lausanne. Il faut donc concevoir une université autosuffisante, qui puisse en quelque sorte offrir les fonctions d’une ville à part entière. Les architectes ont recours à une structure de grande taille permettant d’accueillir un nombre élevé d’étudiant·e·s, ainsi qu’à une hiérarchisation des circulations permettant de distribuer piétons et automobiles séparément. Enfin, la construction est facilitée par l’utilisation de matériaux standardisés et d’éléments préfabriqués aux dimensions régulières.

Ces principes ne sont pas propres à l’EPFL. On les retrouve dans d’autres projets universitaires antérieurs, dont la morphologie générale et les finitions relèvent, eux aussi, d’un souci d’efficacité constructive. Plusieurs universités construites dans les années 1960 et abondamment publiées ont pu ainsi compter parmi les références du bureau ZSA : la Freie Universität à Berlin, la Ruhr-Universität à Bochum et la Philipps-Universität à Marbourg

La période de l’après-guerre se caractérise par la circulation accentuée des théories architecturales et académiques. Ce phénomène est notamment favorisé par la multiplication des publications spécialisées qui diffusent à l’échelle internationale les débats européens et nord-américains dans le domaine de l’architecture. De la même façon, la participation récurrente de certains architectes aux concours lancés pour la construction de nouvelles universités, dans leur pays et à l’étranger, contribue à faire connaître certains des projets marquants de cette période.

Les premiers bâtiments de l’EPFL se caractérisent en premier lieu par une logique structurelle appliquée à grande échelle. Un système modulaire, défini selon une grille de planification de 86.4 x 86.4 m, permet de distribuer les bâtiments de façon optimale. Les avantages de ce système résident notamment dans la flexibilité et les possibilités d’extension qu’il procure.

La mise en place d’une structure modulaire de grande taille, à l’expression industrielle et mécanisée, constitue l’une des caractéristiques de deux importantes universités construites en Allemagne dans l’après-guerre : la Freie Universität à Berlin et la Ruhr-Universität à Bochum. Leurs architectes respectifs eurent dans ces deux cas recours à des éléments constructifs formant un grand abri.

Les architectes de l’EPFL eurent à cœur de concevoir une école qui favorise les échanges entre les différents types d’usager·ère·s du bâtiment, étudiant·e·s, professeur·e·s ou personnel technique et administratif. Cette volonté se traduit notamment dans la conception des espaces organisés autour de bâtiments bas et étalés formant un « tapis ». Ces principes constructifs apparaissent déjà à la Freie Universität. C’est ainsi que ses architectes développent le concept de groundscraper (littéralement “gratte-sol”), comme une réponse horizontale à la hiérarchisation verticale du gratte-ciel.

Les deux écoles sont conçues comme des villes miniatures : les salles et bureaux sont répartis de manière décentralisée autour de rues et de cours intérieures. De même, les circulations piétonne et automobile suivent l’idée de l’université-ville. Ce principe, mis en œuvre à l’EPFL, se retrouve également à la Ruhr-Universität. Dans ce dernier cas, les modes de circulation sont différenciés selon plusieurs niveaux et sont reliés entre eux par un réseau de passerelles.

À l’instar des principes qui guident les choix morphologiques, la sélection des matériaux et leur exploitation doivent être rapides et efficaces. Ainsi, l’emploi du béton armé et l’utilisation d’éléments préfabriqués, assemblés sur le chantier même, sont des aspects-clés du projet. Cette logique constructive avait également régi l’agrandissement de l’université de Marbourg et fut aussi essentielle lors de la construction de l’université de Fribourg, en Suisse. Dans les deux cas, les architectes eurent recours à l’utilisation du béton apparent en façade. A l’EPFL, on retrouve cette même logique de préfabrication. Les caissons métalliques construits en atelier et utilisés en façade sont par exemple très similaires à ceux employés à la Freie Universität, de même que les placages préfabriqués en béton employés pour les revêtements extérieurs.

Enfin, le projet de Zweifel entre en résonance avec d’autres projets d’architecture académique de la période, et ce jusqu’au niveau de ses détails. En effet, les caissons métalliques de façade sont dessinés de manière à ne produire aucun angle abrupt. Ce concept, souvent désigné sous le nom de softline, est développé entre autres dans le projet de la Freie Universität. L’usage de couleurs dans les bâtiments, très en vogue dans l’architecture de l’époque, est aussi exploité à Ecublens. Les tons rouge, orange et brun permettent de signaler les positions des différents départements et d’orienter les étudiant·e·s et les visiteur·euse·s au sein de l’université. La même méthode avait été appliquée à l’université de Berlin, sur les stores des fenêtres donnant sur les cours et dans les rues internes.

La conception des premiers bâtiments de l’EPFL doit beaucoup aux ouvrages d’architecture académique réalisés dans l’après-guerre, sans pour autant n’être qu’une simple copie de certains de leurs modèles les plus fameux. Parmi les éléments remarquables du projet Zweifel figurait la possibilité d’étendre les bâtiments de la première étape lors des étapes ultérieures du chantier. Pourtant, lors des deuxième et troisième phases de la construction de l’école, le système prévu à l’origine fut abandonné. Leurs architectes dictèrent leurs propres règles en termes de composition, de structure, de circulation et de matériaux. Pour s’agrandir, l’EPFL n’avait pas souhaité exploiter la flexibilité des installations conçues par le bureau ZSA. C’est ainsi paradoxalement hors de murs de l’EPFL que les bâtiments de la première étape furent finalement considérés comme des références en matière d’architecture académique, comme par exemple à Berne, lors de la construction de l’université en 1974.

Marta De Benito Ortiz, Maryem Sadek (EPFL, architecture)

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